Il est aisé de démontrer que la "science économique" n'est pas une science mais une idéologie: la nature n'a pas varié en deux cents ans et les sciences de la nature ont connu plusieurs révolutions. Au contraire notre économie a connu plusieurs mutations majeures et les hypothèses fondamentales de l'économie n'ont pas varié d'un iota!
Face à une pensée économique à bout de souffle il faut reconstruire une vision répondant aux défis d'aujourd'hui qui sont plus proches, avec la finitude des ressources, de ceux d'avant la révolution industrielle qu'avec ceux des deux dernier siècles. Le nom de ce qu'on cherche à construire est donc tout trouvé et pas besoin de périphrases et d'oxymores pour masquer la pauvreté de la pensée: c'est le grand "retour en avant" de l'oeconomie, graphie en vigueur jusqu'en 1750 et qui désignait l'art d'assurer le bien être de tous dans le respect des limites de l'environnement.
Comment construire les grandes lignes de cette oeconomie? Là aussi, pas besoin de chercher bien loin: il suffit de remarquer que l'oeconomie n'a pas un statut autonome dans l'organisation des sociétés; c'est seulement l'art de la gouvernance appliqué au domaine particulier de la production, de l'échange et de la consommation.
Et c'est donc à la lumière des principes généraux de gouvernance que j'ai d'abord montré l'impasse de l'économie actuelle, qui ne satisfait pratiquement à aucun de ces principes, puis tracé les principes directeurs de l'oeconomie à venir.
L'une des questions porte sur les acteurs les mieux adaptés à structurer la société et l'oeconomie, ce que j'appelle les "acteurs pivot".
Au vingtième siècle, ces acteurs pivot ont été d'un côté les Etats, assurant la cohérence "horizontale" de la société et de l'autre les grandes entreprises assurant la cohérence "verticale". Les uns et les autres n'avaient pas vocation et ne sont pas adaptés à gérer les relations entre les dimensions écologiques, sociales et économiques. Or les grandes crises de la modernité sont des crises de gestion des relations.
Les acteurs pivot émergents sont ceux qui sont en mesure de gérer les relations: les "territoires", d'un côté, et les filières de production, de l'autre.
C'est ce que j'appelle la revanche des territoires après deux siècles d'effacement progressif. Les territoires devront jouer un rôle central dans l'organisation d'une transition nécessairement systémique. Mais cela suppose aussi une révolution de la gouvernance: les territoires ne sont pas dans leur bulle, ils participent pleinement à un monde interdépendant et pour jouer pleinement leur rôle il faut développer la philosophie et la pratique de la gouvernance à multi niveaux, accordant la priorité non au partage des compétences entre niveaux de coopération mais à la coopération entre les niveaux. On l'a bien compris à l'échelle européenne...mais pas en France. Unir les forces pour promouvoir le rôle des territoires dans la transition c'est la vocation de la Fabrique des transitons (www.fabriquedestransitions.net) créée par Jean François Caron, maire de Loos et dont j'ai l'honneur actuellement d'assurer la présidence.
Le territoire du Méné dans l’Ile-et-Vilaine en est cofondateur.